Carrefour & l’intelligence artificielle : buzz ou réelle stratégie marketing ?

Carrefour profite de son 2ème anniversaire de ses 60 ans pour communiquer tous azimuts, laissant entendre qu’ils lancent des nouveautés très séduisantes pour ses clients.
Cofordis analyse ce qu’il se cache derrière ces annonces.

Une grande campagne de communication, l’IA au secours de l’enseigne, des investissements conséquents : il apparaît clairement que Carrefour cherche un second souffle pour rassurer quant à sa capacité à récupérer des parts de marché. Mais cela suffira-t-il ?

Carrefour + IA de Google, le combo gagnant ?

Rien n’est moins sûr. A première vue, on dirait un simple plug & play, mais en creusant un peu, ce qui est présenté s’apparente ni plus ni moins à l’ouverture d’un nouveau paradigme marketing. Une telle révolution se fait rarement aussi simplement.

Des campagnes marketing ciblées (TV, radio, réseaux sociaux) et boostées à l’IA sont-elles la solution ? Oui si l’on en croit Élodie Perthuisot – Directrice e-commerce, transformation digitale et data de Carrefour : « on s’appuie sur l’expertise de Google, sur leur capacité à nous aider à innover et à comprendre cette nouvelle technologie. L’aide de Google nous permet d’apprendre ce qui se fait de mieux sur nos campagnes marketing historiques puis à expliquer ce que l’on souhaite pour les campagnes à venir. Avec la somme de ça, on arrive en quelques minutes à produire de nouvelles campagnes marketing optimisées sur tous les plans ».

Hopla, l’assistant de courses intelligent de Carrefour

L’expert en grande distri, Olivier Dauvers, a testé cet assistant de courses virtuel couplé à ChatGPT.
Verdict :

– cette aide est limitée aux listes de courses, produits et recettes

– ni le programme de fidélité, ni les commandes, ni les horaires des magasins etc ne sont visibles dans Hopla. Le client doit passer par le Chatbot

– aucune interaction entre l’assistant virtuel et les prix, les offres de l’enseigne : « impossible d’avoir l’écart de prix entre du bio et du conventionnel sur un panier de produit défini, ou la différence de tarif entre un Roquefort et un Bleu d’Auvergne »

– pas d’information sur la disponibilité produit, ni de proposition de remplacement si rupture

– des réponses contradictoires sur les produits

– point + : « connaissance livresque des produits », capacité à établir une liste de courses avec un budget donné en respectant les contraintes alimentaires et qualitatives.

Concluant ou pas ?

Si Carrefour semble convaincu du bien-fondé de sa nouvelle orientation dans l’IA, et fait grand bruit autour de cela, il est légitime de se demander si l’enseigne sera réellement en capacité d’intégrer rapidement l’IA de façon opérationnelle dans ses actions marketings et dans le penser client. Amazon, par exemple, investit 100 millions de dollars dans la création d’un programme d’aide gratuite aux entreprises pour la conception de produits d’IA générative, avec une forte expertise humaine en background. De quoi s’interroger …

Concernant Hopla, très prometteur sur papier mais pas réellement aboutie, c’est là encore un gros effet d’annonce sans réelle innovation : 15 magasins E.Leclerc utilisent déjà depuis plusieurs années la solution Edou qui transmet à leurs clients une liste de course élaborée via les achats récents en suivant l’ordre logique du magasin, des bouteilles jusqu’au frais.
Autre exemple : la société Omaria est capable d’envoyer des emails ultra personnalisés à des clients qui recevront au moment idoine, une liste de course adaptée à leurs besoins.
Au final, tous ces points déceptifs mettent en lumière une déconsidération du “penser client”. Deux questions se posent alors : comment le commerçant va-t-il se servir de ces nouvelles technologies vis à vis des clients, et en quoi cela va-t-il lui permettre d’augmenter les ventes ? L’IA générative chez les commerçants ne serait-elle en fait qu’un nouveau moyen de communiquer ? Visiblement oui même si bon nombre d’utilisateurs voient en elle, un outil qui fait le travail tout seule : l’IA réfléchit, propose et hop, la solution ad ‘hoc apparaît.
C’est oublier qu’avant de parvenir à cette autonomie, il va falloir des analyses métiers très poussées pour imaginer comment il serait possible d’améliorer puis de développer cette technologie.

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