Le boum de la consommation locale va-t-il perdurer ?

Pendant le confinement, les consommateurs se sont tournés vers les produits locaux. Plus rassurants ? Sûrement. Si cette tendance s’est amorcée avant la crise de la COVID 19, les experts parlent aujourd’hui de révolution.

Tendance éphémère ou changement durable, Cofordis a voulu en savoir plus.

A l’annonce du confinement, il a fallu s’adapter à une situation totalement nouvelle que personne n’avait anticipée.
Les marchés, restaurants … ont fermé, privant ainsi les producteurs de leur moyen de distribution essentiel.
Les filières bovines et laitières ont vu leurs exportations vers la Chine bloquées dès février.

En France, ce fût également le chaos : la vente de ces produits vers la restauration commerciale et collective représente 61% du volume de la viande bovine produit et 41% pour les produits laitiers.

Le boom des circuits courts

Si le bio a connu une envolée de 63% à mi-mars (contre 14 à 20% pour le traditionnel), le maraîchage s’est distingué. Selon Olivier Riou – Président de la Fédération Nationale de l’Agriculture Bio, « le panier moyen en maraîchage a connu une hausse de 25 à 30%. Les circuits courts rassurent dans la relation humaine, par rapport à la grande surface [anonyme]. Â»

Certains producteurs se sont même lancés dans la vente en ligne et en Drive.
Des communes, à l’instar de Saint Maur des Fossés (Val de Marne) ont créé un site internet permettant aux consommateurs de commander les produits qu’ils achetaient habituellement sur le marché.

La grande distri a saisi le coche

Qui n’a pas remarqué la multiplication des fruits et légumes produits en France dans les rayons de son supermarché ? Cet effort de « solidarité nationale Â» demandé par l’ancien ministre de l’Agriculture Didier Guillaume a bien été entendu.

Pour exemple ce producteur de pommes de terre du Nord de la France qui a vendu sa production en direct, à Auchan pour la 1ère fois … alors que cela fait 45 ans qu’il est installé à côté du supermarché !

Thierry Cotillard – ex-Président d’Intermarché et de Netto, note « un renforcement positif des liens de proximité et des changements positifs pour l’avenir. Nous avons mis en place des systèmes de référencement en moins de 48 heures pour les producteurs. Quasiment tous les magasins ont la moitié des fruits et légumes en local Â».

La grande distribution n’a pas eu d’autre choix que de se plier à cette tendance d’acheter local, souvent poussée par la génération Y : – 8,1 points de parts de marché contre + 2,5% pour les commerces de proximité (source Kantar). C’est l’occasion rêvée de capter cette frange de consommateurs demandeurs de produits non seulement bio, mais également locaux, éco-responsables, durables et solidaires.

www.jaidelesproducteurslocaux.fr une idée de génie

Créée à l’initiative de Damien Kühn, cette plateforme permet aux producteurs locaux d’écouler leurs stocks de produits agricoles, mais également laitiers, de la charcuterie, du vin du chocolat … La mise en relation gratuite entre producteurs et consommateurs s’est élargie aux distributeurs désireux de soutenir la filière française pendant cette crise.
Damien Kühn est convaincu que le bel essor de sa plateforme perdurera dans la mesure où les produits proposés ne sont pas forcément plus chers. En achetant en direct, on supprime 4 ou 5 intermédiaires : « La grande distribution était jusqu’à présent très orientée prix, en y enfermant le consommateur, mais ça ne menait à rien : aujourd’hui, on est capable de faire l’effort, de prendre le temps de s’occuper de soi, et cela passe par les producteurs locaux Â».

Pas de retour en arrière d’après les experts

La dernière étude de l’Observatoire E.Leclerc des nouvelles consommations (Ipsos – avril 2020), met en avant le fait que pendant le confinement, les français ont plébiscité les produits d’origine française (45%), frais (37%), issus de circuits courts (37%). 63% annonce vouloir consommer plus de produits locaux afin de soutenir l’économie.

82% des consommateurs disent continuer de vouloir acheter des produits locaux (source Ifop). La volonté d’acheter solidaire et responsable est bel et bien là, non seulement pour manger sain et être en bonne santé, pour protéger l’environnement, mais également pour donner une rémunération juste aux producteurs dans la grande distribution ; les écarts de prix entre le prix producteur et le prix consommateur sont souvent pointés du doigt.

L’attrait du local, du « made in France Â» semble s’installer.
Si les acteurs de la grande distribution sont imaginatifs, ils séduiront de nouveaux clients ; crise signifie souvent moins de pouvoir d’achat, donc chasse aux petits prix.
Mais les petits commerces et le on-line ont le vent en poupe car ils évitent les contacts.

On peut réellement penser qu’une transformation majeure de l’acte d’achat se joue actuellement. Le confinement a permis de dépasser des limites que l’on se fixait avant : consommer local n’est pas si compliqué. Après l’essor du bio, du local, verra-t-on l’apparition de « l’ultra local Â», celui qui permet d’acheter juste à côté de chez soi, voire directement chez le producteur, même si c’est un peu plus cher. Des propriétaires d’enseignes indépendantes y réfléchissent déjà.